Les systèmes de santé sont complexes. Très complexes. Le chemin qui mène à offrir des services ou à en obtenir ressemble parfois à un labyrinthe. Qui plus est, de nombreuses parties prenantes sont impliquées pour y arriver ainsi que pour évaluer si nous nous sommes rendus à destination de la bonne manière. Les gouvernements et ministères de la santé et des services sociaux, les collèges et ordres professionnels, le personnel, les conseils portant sur la qualité et les organismes accréditeurs pour la qualité, la ligne de gestion, les groupes pour les patients et les commissaires aux plaintes sont toutes des instances importantes qui contribuent à s’assurer de la qualité des soins et de leur amélioration en continu. Mais à l’intérieur de systèmes aussi complexes qui déploient des processus tout aussi complexes avec autant de parties prenantes impliquées dans ceux-ci, qui est, ultimement, responsable pour la qualité des soins? En réalité, cela dépend…
Si nous nous penchons sur la qualité des actes professionnels, la responsabilité incombe aux collèges et ordres professionnels. Si nous évaluons la qualité des soins reçus, cela dépend de qui a reçu les soins, ce qui relève de l’expérience patient et parfois implique le(la) commissaire aux plaintes concerné(e). Si nous regardons les standards de qualité dans lesquels s’inscrivent les soins et les programmes pour améliorer leur qualité en continu, les organismes accréditeurs tel qu’ Agrément Canada sont interpellés pour offrir l’expertise, les conseils et la surveillance des standards. Par ailleurs, si nous souhaitons évaluer les résultats populationnels de santé et en suivre les indicateurs, nous nous retrouvons à interpeller les experts en santé publique et les gouvernements ou la gestion organisationnelle afin de bien saisir la qualité globale des soins offerts et de leur impact sur la santé des populations. En somme, il y a tellement de facettes aux responsabilités associées à la qualité des soins que nous nous retrouvons à la case de départ pour déterminer qui, ultimement, est responsable pour celle-ci. Alors, y a-t-il un moyen d’y arriver?
À mon sens, la réponse est aussi très complexe dans sa gestion mais relativement simple dans son principe: toutes les parties prenantes sont responsables conjointement. Travailler ensemble pour faire converger les différentes facettes de l’évaluation, l’expertise de chacun et les enjeux en lien avec la qualité des soins représente la seule voie plausible et efficace pour bien saisir la complexité d’une saine gestion des soins et de leur amélioration en continu. Bien évidemment, il est plus facile de le dire que de l’accomplir. Le premier pas est néanmoins de prendre conscience et reconnaître que la seule voie qui permet de manière concrète de créer un processus efficace d’évaluation et d’amélioration de la qualité des soins est de travailler tous ensemble. Voilà pourquoi une culture organisationnelle qui est dénuée de cette tendance naturelle de vouloir attribuer le blâme doit être favorisée et soutenue. La notion de responsabilité ne devrait pas être associée avec un blâme potentiel dans une culture qui souhaite réellement promouvoir l’amélioration continue des soins. Nous devons apprendre de nos erreurs et être ouverts et transparents envers celles-ci.
Les soins de santé sont complexes et leur qualité découle directement du niveau de travail concerté que nous investissons pour les améliorer. Bien sûr, un tel point de vue soulève une question additionnelle, à savoir si une imputabilité quelconque peut être associée aux systèmes de santé. Lorsque l’évaluation, le suivi et l’amélioration de la qualité des soins sont concernés, se rendre du point A au point B peut nous mettre au défi. Dans ce contexte, l’attribution d’une imputabilité à une ou plusieurs parties prenantes représente une méthode efficace pour s’assurer d’un cheminement réussi du point A au point B. Cependant, l’assignation d’une imputabilité ne modifie pas le besoin de travailler ensemble. Cela demeure notre responsabilité partagée. L’attribution d’une imputabilité peut être utile dans certaines circonstances mais il n’en demeure pas moins qu’une telle approche vient avec le risque de créer la tentation de résoudre certains enjeux par le blâme. Cela peut très certainement nous apparaître justifié de manière temporaire mais le blâme ne règle rien. Ce constat est encore plus vrai lorsque les enjeux sont exacerbés par les tractations politiques qui viennent avec nos systèmes de santé. Cela mérite réflexion, bien sûr, mais la politique dans les systèmes de santé est un autre bon sujet pour un prochain article…
En attendant, portez-vous bien et soyez heureux.
B.