Les champs de bataille offrent souvent un point de vue sur la destruction, la souffrance et le désespoir. Ils peuvent aussi être la scène sur laquelle l’héroïsme peut s’exprimer et permettre à des signes d’espoir pour le futur de se manifester. Bien que certains peuvent, pour de bonnes raisons, être en désaccord avec l’utilisation d’une telle analogie, le sentiment que la pandémie a été, et continue d’être, un champ de bataille est difficile à combattre. Nous avons été bombardés par des menaces liées à la covid-19, attaqués par la peur et le deuil, plongés dans la noirceur et forcés de transformer nos vies pour mener le combat. Au coeur de ce champ de bataille, alors que les combats faisaient rage un peu partout, un rayon de lumière a néanmoins continué de briller. Visiblement, des fleurs d’espoir continuaient de pousser avec persévérance; des fleurs de courage et de dévouement qui ont fait toute la différence.
Les travailleurs(ses) de la santé au front et ceux et celles qui ont travaillé dans l’ombre pour les soutenir jour et nuit afin de permettre à nos systèmes de santé de fonctionner sont des héros pandémiques; tout comme les autres travailleurs essentiels qui ont permis à notre société de se maintenir à flot. Leur dévouement, courage et persévérance sont les fleurs sur ce champ de bataille. Alors que notre sentiment général d’être dans l’après-coup ne cesse de grandir malgré que le combat continue et soit toujours présent de bien des manières, nous prenons de plus en plus acte des erreurs commises, voire des échecs dans certains cas comme par exemple la tragédie vécue dans les centres de soins de longue durée (CHSLD). Il s’agit d’un réflexe naturel de se concentrer sur les enjeux à régler ou sur les façons de poursuivre la route pour retrouver une nouvelle normalité et de prendre acte de nos deuils des disparus(es). Bien que le champ de bataille puisse être éprouvant à bien des égards, cela ne devrait pas nous empêcher de célébrer nos succès et tout ce qui a été bien fait. Dans cet optique, les travailleurs(ses) de la santé au front méritent d’être en tête de liste.
Au tout début de la pandémie, les travailleurs(ses) de la santé au front se sont retrouvés(es) face à un ennemi qui tuait les gens par milliers. Des histoires d’horreur venues de tous les coins du monde étaient transmises quotidiennement et insufflaient la peur. Nous étions mal préparés pour faire face à une crise d’une telle ampleur: l’information scientifique était incomplète ou inexistante, les équipements de protection personnelle se raréfiaient ou étaient inadéquats et le manque de personnel grandissait en taille et en fréquence ce qui rendait la situation encore plus critique. Malgré tout cela, le personnel au front persistait et se présentait au combat pour aider les gens à se battre pour leur vie et pour aider nos systèmes à combattre la pandémie. Une démonstration de courage, de dévouement et d’humanité absolument exceptionnelle.
Alors que la pandémie a progressé et nous a permis de passer d’un état pur de crise à un mode de gestion active d’une menace sérieuse, l’épuisement est devenu un thème récurrent au sein du personnel au front. Même si une brève pause permettant de reprendre son souffle fut possible pour certains durant l’été 2020, la préparation pour la deuxième vague et la gestion de celle-ci a maintenu la pression sur le personnel à un haut niveau. La deuxième vague a généré un nombre encore plus grand de cas et a frappé plusieurs juridictions de plein fouet. Elle n’en a épargné aucune, même celles qui avaient réussi à s’en sortir assez bien durant la première vague. En somme, cette impression de sprint vers la ligne d’arrivée découlant de la réponse à la première vague devenait, dans la seconde vague, un sentiment d’être dans un marathon sans fin contre un virus qui refusait résolument de se laisser dompter. L’épuisement s’est répandu et est devenu prévalent mais le personnel au front a poursuivi le combat même si plusieurs tombaient; victime d’un trop grand stress, de la fatigue extrême ou de la maladie.
L’organisation mondiale de la santé (OMS) a estimé récemment que 115,000 travailleurs(ses) de la santé à travers le monde sont décédés(es) durant la pandémie. Au Canada, nous avons été soulagés de constater que le nombre de décès de travailleurs(ses) de la santé est demeuré plus bas que dans bien d’autres pays mais quand même, ne sommes-nous pas tous d’accord pour affirmer qu’un seul décès est déjà un de trop? La nouvelle d’un frère ou d’une soeur d’armes qui tombe au combat est suffisante pour nourrir la peur, le désespoir et l’épuisement au sein de ceux et celles qui poursuivent le combat. Les travailleurs(ses) de la santé au front ont néanmoins persévéré car c’était la bonne chose à faire. C’est la raison pourquoi ils(elles) ont choisi une carrière en santé, leur vocation : faire une différence significative. Mission accomplie!
Au risque d’être perçu un peu trop dramatique, j’ai la conviction que la plupart d’entre nous est d’avis que notre société est ce qu’elle est grâce à une telle démonstration de courage, de dévouement et d’humanité. Nous devons beaucoup aux travailleurs(ses) de la santé au front et nous le devons à qui ils sont. Leurs valeurs et engagement à aider les autres sont les ingrédients qui ont rendu possible de traverser la pandémie comme nous l’avons fait.
Certains diront que notre combat est loin d’avoir été parfait et que plusieurs enjeux doivent être réglés. Ils ont raison de le dire. Ce fait indiscutable ne nous empêche toutefois pas de prendre acte, avec gratitude, qu’il y avait tout au long du combat, et qu’il y a toujours, des fleurs sur le champ de bataille. Prenons un temps d’arrêt pour les reconnaître sincèrement. Elles peignent un portrait émouvant qui est de toute beauté… Merci infiniment à vous tous et toutes qui avez fait toute la différence! Vous êtes nos fleurs sur le champ de bataille, notre lumière dans les ténèbres. Méditons sur cette pensée pour un moment… Nous aurons bien d’autres occasions d’approfondir l’analyse, bonne ou mauvaise, de notre gestion du champ de bataille car il s’agit d’autres pistes de réflexion intéressantes pour de prochains articles…
En attendant, portez-vous bien et soyez heureux.
B.